A une dizaine de jours de la reprise du championnat, Thierry Weizman se livre dans un long entretien. Dans cette seconde partie, il évoque le nouveau standing de Metz Handball et le rapport qu’il entretient avec un club qu’il préside depuis plus d’une décennie.
Désolé de revenir sur la seule défaite de la saison. Mais comme c’est la seule, elle est insolite. Le revers à Podgorica est-il acceptable ?
Podgorica n’est pas une équipe anodine. L’ancien Podgorica nous réussissait presque plus que le nouveau car les joueuses étaient plus âgées. Là on observe des joueuses jeunes, talentueuses qui ont montré ce qu’elles étaient capables de faire au Mondial dans la sélection monténégrine. Sur notre match là-bas, nous avons peut-être été surpris par l’intensité du combat et par le fait qu’en face elles n’avaient pas du tout l’intention de se faire marcher dessus malgré leur jeunesse. Et je considère à un degré vraiment moindre que c’est un peu comme quand nous sommes allés perdre à Brest en Coupe de France alors que le club breton était encore en D2. A Podgorica, on a eu l’impression que ça allait être facile sans Neagu et Bulatovic mais ce n’était pas le cas. Après, cette équipe de Metz Handball a tout de même le droit à un match plus faible de temps en temps ce n’est pas un drame….
Metz Handball possède-t-il plus de poids dans ses rapports avec les instances européennes depuis que le club enchaîne les bons résultats ?
Plus de poids je n’en sais rien mais nous avons clairement gagné en reconnaissance. Elle vient d’abord des autres dirigeants qui nous voient eux-mêmes comme un candidat crédible au Final 4 de Ligue des Champions et qui grimacent quand ils tombent contre Metz. Et puis elle vient quand il s’agit de penser au recrutement. Désormais, plus rien ne semble impossible pour Metz Handball. Quand vous battez Györ et le Vardar puis que vous enchaînez la saison d’après histoire de prouver que tout ça n’était pas un coup de bol, vous gagnez en crédibilité.
Et c’est plus facile de recruter ?
Maintenant quand on appelle des joueuses de calibre planétaire, elles ne ricanent plus et elles ne raccrochent plus le téléphone. Elles se révèlent intéressées et elles attendent des propositions. Elles savent qu’elles ne seront sûrement pas aussi bien payées que dans les gros clubs étrangers mais elles savent aussi que le projet de Metz Handball monte en puissance.
Ne pas atteindre le Final 4 cette année en Ligue des Champions, ce serait un échec ?
Non car si on regarde les budgets… Aller en quarts de finale avec 2,5 millions de budget c’est déjà magnifique. Maintenant si on n’atteint pas ce Final 4 je serai plus déçu pour le staff et pour les filles que pour moi. Je vois tellement le travail et l’investissement des joueuses et je sais à quel point elles aspirent à faire partie des quatre meilleures équipes d’Europe que je serais triste pour elles. Déjà l’année dernière elles avaient été incroyablement déçues de perdre contre le futur champion d’Europe.
Invaincue sur le plan national, on sent cette équipe presque imbattable non ?
Avant, on ne dominait pas sur le plan européen et la concurrence nationale se limitait alors à une équipe. Point. Là, c’est compliqué d’aller jouer à Nice, on a galéré à Chambray la saison dernière, je ne parle même pas des rencontres à Brest ou à Issy Paris… Rien n’est simple.
Sauf que ça marche quand même….
C’est grâce à Manu et c’est parce que les joueuses sont arrivées à maturité. Comme Grâce, comme Xénia qui progresse…. Enfin elles ont toutes progressé. Ce n’est pas hasard et c’est lui le chef d’orchestre de ce groupe.
Vous vous éclatez toujours à la tête de Metz Handball ?
Je m’éclate différemment. J’ai presque honte de le dire mais je ne m’éclate plus quand on décroche un titre de champion de France. Je suis très content pour les filles, l’entraîneur et le club mais je ne saute plus de joie comme avant. Je ne saute plus non plus de joie quand on gagne une Coupe de France mais je saute de joie quand je sais qu’on ira disputer la finale à Bercy. En fait je suis heureux pour la reconnaissance du travail accompli car Manu et les joueuses travaillent énormément. Je suis heureux pour Yacine quand une Orlane Kanor joue en équipe de France. Ca ça m’éclate ! Tant qu’on aura pas gagné une coupe d’Europe ou atteint un Final 4, je n’aurais pas de nouvelles joies sportives.
Là il sautera de joie le président Weizman ?
Ah ouai ! Tout ce qui te paraît inaccessible te procure des joies extraordinaires.
Vous aimez parler d’époque formidable…
Je vis une époque formidable car je connais une grande sérénité. L’entente que j’ai avec Manu par exemple. Il m’appelle « le boss » mais pour moi c’est un pote. Je passe de très bons moments avec les joueuses… Avec chacune des filles j’ai une relation particulière si bien que ces rapports humains me donnent plus de joie aujourd’hui qu’un titre de plus ou de moins. Et puis on connaît une sérénité totale dans le fonctionnement de ce club. A tous les étages. En plus financièrement le club va très bien… Je n’ai que des satisfactions. Et puis je vis des moments particuliers.
Comment ça ?
Mes après-matches qui durent deux heures durant lesquels on refait le monde avec Isabelle Wendling, ma vice-présidente Karine Séchet, mon comptable Guy Brun et Manu Mayonnade… ça ça me procure vachement de joie et c’est important pour moi.
Propos recueillis par Rémi Alezine
Photo : R.A