Les compétitions nationales, la coupe d’Europe, la saison à venir, le budget, la médiatisation… A l’occasion d’une fin de saison qui a vu Metz Handball remporter le championnat et la Coupe de France après une participation historique au Final 4 de Ligue des Champions, le président Thierry Weizman se livre longuement sur le site Internet du club.
Metz Handball a survolé la saison régulière, les play-offs et la Coupe de France. Thierry Weizman, avez-vous en mémoire le souvenir d’un Metz Handball aussi dominateur sur la scène nationale ?
Non, je n’ai pas le souvenir d’une telle mainmise. Même quand on avait en face de nous Gagny, Besançon, Le Havre ou Fleury, pour parler des différentes périodes de l’histoire du club, j’étais plus confiant que je ne l’étais au début de cette saison. Cette fois, c’est un effet de surprise énorme pour tout le monde. Le milieu du handball pensait qu’on partait sur une domination de Brest tant, sur le papier, cette équipe était séduisante. Je le pensais aussi. Et là, on se retrouve avec une domination messine encore plus grande que lors des autres années où nous avions également réalisé ce doublé coupe/championnat.
En début de saison, les filles ont-elles été vexées que l’on parle autant de Brest, voire de Nantes ?
Tout le monde parlait de Brest et, c’est vrai, il ne fallait pas oublier Nantes. Manu m’a de suite dit « Même pas peur, ne t’inquiète pas ». Donc déjà quand ton coach te dit ça tu es rassuré. Ensuite, les joueuses cadres de l’équipe m’ont également transmis le même message. Je parle de joueuses d’expérience comme Grâce Zaadi, Laura Glauser, Béatrice Edwige, Laura Flippes… Je ne sais si elles ont ressenti une quelconque vexation mais j’ai senti un gros capital confiance.
Il y a eu ce gros coup asséné à Brest lors du match aller de saison régulière (20-35), ces victoires contre des « gros » en Ligue des Champions. En fait, on a un peu senti que rien ne pouvait arriver à Metz Handball cette saison. Vous partagez ce sentiment ?
Tout à fait. Cette impression que rien ne pouvait nous arriver à domicile quelle que soit l’équipe d’en face. Mais, à chaque match, que ce soit en France ou en Europe, je me suis dit qu’on allait bien connaître un accident et en manquer un. On l’a loupé au plus mauvais moment, au Final 4, contre Rostov.
Justement, qu’a manqué Metz Handball lors de ce match ?
On manque une seule mi-temps. Ce qui aurait pu ne pas être rédhibitoire car avec un arbitrage normal on aurait conservé toutes nos chances de qualification pour la finale. Pourquoi est-ce qu’on a loupé cette mi-temps ? Je pense que la pression était énorme et que cette compétition est bien différente des autres, y compris des autres compétitions internationales. La médiatisation, l’emploi du temps sur place, les motards… toutes ces choses nous ont entraînées dans un milieu que nous ne connaissions pas. Je considère également que ça a été un désavantage de jouer Rostov car, inconsciemment, les filles ont dû penser que c’était un bon tirage car nous les avions battus deux fois. Malgré tous les efforts de Manu sur le fait de repartir de zéro au coup d’envoi, les joueuses se sont peut-être dites qu’il suffisait de faire ce que l’on avait fait les autres fois alors qu’il convenait de faire un peu plus.
Peut-on dire quelques mots de la défaite lors du match de classement face à Vipers Kristiansand ?
L’entraineur de Vipers a été très malin. Il a très bien géré le fait de jouer Györ au premier match. Après une mi-temps, il s’est rendu compte qu’il ne pouvait pas se qualifier pour la finale et il a préparé notre match. Je pense qu’il a économisé ses cadres et qu’il s’est préparé au match de classement. Je crois vraiment que notre équipe est plus forte que celle de Vipers. Mais ça s’est joué sur un coup de dés… je pense que le mental nous a fait défaut sur la fin du match. On a une médaille, ou pas, pour un but ou deux.
Question bête mais, pourquoi ça marche à ce point Metz Handball ?
Ce qui fait la force de cette équipe, c’est la cohésion et la mentalité des joueuses et du staff. Tout ce petit monde a envie de réussir quelque chose, ensemble, à Metz. Et peu importe les considérations financières. Pour avoir suivi l’équipe à Budapest et puis fait la fête avec les filles après la victoire en Coupe de France, je peux affirmer que ce groupe est incroyablement sain. C’est ce qui fait notre force. Il existe une confiance absolument incroyable, les maillons de la chaîne sont incroyablement bien soudés et cette chaîne est prête à résister à tout.
Le club a été médiatisé comme jamais à l’occasion de ce Final 4. Comment capitaliser là-dessus ?
C’est la plus grosse médiatisation jamais connue par le club. Localement mais aussi sur le plan national avec Le Monde, Franceinfo, RMC Sport… J’ai été surpris par l’intérêt qu’on a suscité sur le plan national et sur le retentissement de cette aventure européenne. Des responsables, dans d’autres sports, se sont penchés sur le cas du handball féminin à Metz. J’ai pris conscience que la Ligue des Champions est vraiment un évènement à part. Cette compétition fait tourner les têtes, quel que soit le sport. J’espère que la visibilité qu’on a eue va nous permettre d’attirer d’autres partenaires pour la saison prochaine.
Le budget pourrait-il augmenter ?
Cette année les subventions ont augmenté en cours de saison. La Région, le Département et la Ville ont gratifié cette accession au Final 4. Le conseil départemental a d’ores et déjà promis une aide encore supérieure l’année prochaine. Au niveau de la Ville de Metz on verra ce que je peux faire dans un contexte d’année électorale et je vais bien sûr également solliciter la Région Grand Est. Mais le conseil départemental de la Moselle a montré la voie. En ce qui concerne les partenaires privés, ils ont été charmés par l’aventure européenne. Certains nous ont accompagnés à Budapest et j’espère que, lorsqu’on va les solliciter prochainement, ils feront un geste compte tenu du fait qu’on veut tous y retourner.
La saison prochaine, le coach et de nombreuses joueuses « cadres » seront en fin de contrat. La base arrière sera renforcée avec le renfort de Burgaard et le retour de Sajka. Peut-on dire que c’est l’année ou jamais ?
Ce club a trente ans d’existence. Quand on a perdu une finale de Coupe d’Europe, en 2013, je ne me suis pas dit que c’était l’année ou jamais et j’ai pensé que le club allait continuer à grandir. Donc quoi qu’il arrive le club continuera à évoluer. L’année prochaine, il est vrai que nous serons dans une position favorable pour plusieurs raisons. On garde le même coach et le même groupe et je crois que l’équipe sera encore meilleure. Nos internationales ont encore progressé et puis nous serons plus forts sur le poste d’arrière droit avec le retour de Sajka et l’arrivée de Burgaard, sacrée meilleure à son poste au Danemark.
Au pivot, Olga Perederiy arrive alors que Béatrice Edwige s’en va pour Györ…
Au pivot, Olga est plus jeune et moins expérimentée que Béatrice Edwige, elle va avoir une excellente entende avec Grâce Zaddi. Et puis, pour parler de l’ensemble du groupe, nos deux jeunes pépites Orlane Kanor et Méline Nocandy vont encore progresser.
Peut-on tout de même se projeter sur la fin de saison 2019-2020 et toutes ces fins de contrat ?
La fin de la saison prochaine sera peut-être un moment charnière. Ou bien les joueuses cadres se disent qu’elles peuvent aller au bout avec ce club, ou bien elles se disent qu’il va toujours nous manquer quelque chose et elles iront rejoindre un club mieux classé que nous dans la hiérarchie européenne. Je pense que tout ceci dépendra beaucoup de ce que fera Manu Mayonnade la saison prochaine. Bien évidemment j’espère qu’il restera.
Yacine Messaoudi quitte la tête du centre de formation pour entraîner Paris 92. C’était inévitable ?
Il avait certainement envie de franchir un cap. Là, il va dans sa ville d’origine et on peut comprendre qu’il ait été tenté par un poste d’entraîneur de D1. On lui souhaite le maximum de réussite. J’ai adoré travaillé avec lui, il a beaucoup apporté au club, comme le club lui a beaucoup apporté également. En fait, c’est un peu comme un oisillon qui quitte le nid, c’est normal.
Un mot sur son successeur, Clément Alcacer ?
Clément a envie de taper dedans. J’ai énormément apprécié qu’on le contacte et que, dès le lendemain, il laisse tout tomber pour venir en train à Metz. Ca fait partie des gens qui ont vraiment envie de travailler avec nous. Il a bien sûr les diplômes et les compétences mais, le mec qui lâche tout pour venir nous rejoindre, j’ai adoré.
Propos recueillis par Rémi Alezine
Photo : Cedosa